Mathilde Pourplanche:
Avant de commencer, rapide explication de ce qu'est le démembrement.
Le démembrement, c'est le fait de diviser la propriété d'un bien en deux avec d'une part l'usufruit et d'autre part la nue-propriété. L'usufruit est détenu par l'usufruitier qui détient l'usus et le fructus. L’usus qui est le droit de disposer du bien et le fructus qui est le droit de pouvoir utiliser les fruits du bien.
D'autre part donc, la nue-propriété qui est détenue par le nu-propriétaire et qui lui a l'abusus et qui a le droit de propriété du bien.
Démembrement : quels intérêts ?
Alors l'intérêt de démembrer les droits du contrat d'assurance ?
Je dirais qu'il y a vraiment trois gros avantages : le premier c'est de pouvoir donner, sans se dépouiller, au nu-propriétaire. Donc on va conserver un contrôle des droits du contrat. Le deuxième, c'est de pouvoir protéger son époux puisque l’époux survivant va pouvoir continuer l'usufruit de son époux prédécédé. Et le dernier, c'est le droit de pouvoir réaliser des rachats au-delà de la plus-value du contrat.
Démembrement : quid en pratique ?
Grégory Homans:
Dans le cadre d'un démembrement de propriété des droits sur le contrat, je pense qu'il faut d'abord se rappeler qui sont les parties dans un contrat.
Donc il y a trois parties :
- le preneur,
- l'assuré
- et le bénéficiaire.
Une structure traditionnelle dans le cadre d'un démembrement, c'est que les droits du preneur soient démembrés. Cela signifie que les parents généralement seront l'usufruitier, ils exerceront un usufruit sur les droits de preneur et l'enfant exercera la nue-propriété sur les droits du preneur. L'assuré (donc pour rappel c'est au décès de l’assuré que le contrat se dénoue) c'est généralement l'enfant nu-propriétaire.
Pourquoi ? Et bien, pour que le contrat puisse survivre au décès du premier des parents et qu'on puisse s'appuyer sur le contrat pour contribuer à la protection du conjoint survivant.
Les droits sur les bénéficiaires sont aussi démembrés. Les parents en ont l'usufruit, les enfants ou l'enfant en a la nue-propriété.
Il est prudent de définir les droits et obligations des usufruitiers et des nus-propriétaires conventionnellement, que ça soit dans un avenant spécifique ou dans le cadre d'une donation qui créé le démembrement de propriété.
Démembrement : quand l’implémenter ?
Mathilde Pourplanche:
Donc le démembrement, finalement il peut intervenir :
- avant la souscription du contrat,
- à la souscription ou,
- à posteriori.
Avant la souscription, ça signifierait donc que le démembrement existe via une succession ou un don réalisé en démembrement. Au moment de la souscription, ça signifierait donc que chaque qualité, l'usufruitier et le nu-propriétaire, aurait payé sa part au contrat selon la table de conversion d'usufruit.
Grégory Homans:
Ok donc chacune des parties verse des avoirs dont elle est titulaire en pleine propriété dans le contrat, l’un à un concurrence de la valeur de l'usufruit l'autre à concurrence de la valeur de la nue-propriété et le démembrement se créé dans le contrat même.
Mathilde Pourplanche:
C’est ça !
Grégory Homans:
Génial ! Si tu me permets, je fais la a posteriori.
Mathilde Pourplanche:
Je te laisse.
Grégory Homans:
Merci beaucoup. Un exemple vaut mieux que mille mots.
Je propose de partir d'un cas concret : je souscris un contrat d'assurance sur la tête de mon fils. Puis je te rencontre et je me dis : ben tiens ça serait quand même bien de lui donner. En tant que titulaire de l'intégralité des droits du preneur, je peux lui donner en pleine propriété mais je pourrais également lui donner en nue-propriété et me réserver l'usufruit. Mettons que j'opte pour une donation en nue-propriété.
Suite à cette donation, les droits du preneur sont ventilés de la manière suivante : je suis titulaire de l'usufruit, ma chère tête blonde est titulaire de la nue-propriété et donc on a un démembrement de propriété a posteriori.
Ce démembrement de propriétaire a postériori présente un autre intérêt : imaginez que l'ordre naturel des choses se rencontre et je décède avant mon fils. Mon fils étant la tête assurée, le contrat est maintenu. Il pense peut-être devenir entier propriétaire et bien non. Suite à l'usufruit successif entré en vigueur en septembre 2018, mon épouse va rentrer dans mes chaussons d'usufruitier et poursuivre mon usufruit. Ainsi, elle sera protégée.
Souvent dans le cas d'une planification patrimoniale qu'on rencontre pour nos clients, un des souhaits est de protéger le conjoint survivant.
Don de la nue-propriété des droits du preneur : comment la réaliser ?
Concernant la donation des droits, notamment des droits de nue-propriété, elle peut se réaliser de deux manières :
- soit on passe par un acte notarié avec les conséquences fiscales qu'on connaît ; il faut l'enregistrer vu qu'on est en ligne directe. C’est 3 ou 3,3% selon la région compétente.
- soit on passe par un acte sous seing privé. On s'appuie sur l'avenant de cession (du contrat – obligation des droits des assurances) et on fait un pacte adjoint constatant la donation.
A ça, il faut être quand même relativement attentif à articuler cette technique, ce procédé je vais dire, avec l'article 9 du Code des droits de succession qui est une fiction fiscale qui peut s'appliquer dans certains cas.
Donc la prudence est de mise, c'est possible mais prudence.