Le marché du logement neuf est en proie à une crise profonde, caractérisée par une montée constante des prix et des taux d'intérêt de plus en plus élevés, exacerbant la situation. La preuve en est une nouvelle fois apportée par les chiffres : les réservations de logements neufs auprès des promoteurs immobiliers ont chuté d'environ 40% au deuxième trimestre 2023 par rapport à la même période de l'année précédente, selon les statistiques du ministère de la Transition écologique. Avec moins de 18 000 logements réservés, la commercialisation connaît ainsi un cinquième trimestre consécutif de baisse (voir graphique ci-dessous). Une telle baisse n'a même pas été observée lors de la crise du Covid-19, marquant une diminution de 18% par rapport au deuxième trimestre 2020.
Cette situation découle en grande partie de la hausse rapide des taux de crédit immobilier, qui a substantiellement réduit le pouvoir d'achat des ménages, les empêchant d'investir dans un logement neuf. Ce phénomène touche également les maisons, autrefois très prisées, avec une chute impressionnante de 45% sur un an, et les appartements subissent également une baisse significative de 39,5%. La diminution des prêts accordés par les banques reflète cette tendance, puisque la quasi-totalité des acheteurs recourt à un crédit pour acquérir un bien immobilier.
Cette crise pousse à la réflexion sur certaines décisions gouvernementales, initialement favorables mais devenues contreproductives avec le retournement du marché. Les prix de l'immobilier neuf continuent d'augmenter, ce qui aggrave la situation, contrairement au marché de l'ancien. Les promoteurs estiment que le prix moyen au mètre carré d'un logement collectif en France atteint 4800 euros, tandis qu'une maison individuelle coûte en moyenne 35% de plus.
Comparativement au marché de l'ancien, cette chute est encore plus prononcée dans le logement neuf, où les ventes ont reculé de 15% à 20%. Les promoteurs sont confrontés à des difficultés d'accès au crédit pour les acheteurs ainsi qu'à une hausse des coûts de construction. La réduction des aides à la construction neuve, incluant la suppression du dispositif de défiscalisation Pinel et la recentration des prêts à taux zéro, contribue également à cette crise.
Les grands groupes du secteur, tels que Vinci, Bouygues et Nexity, voient leurs réservations en nette baisse. Pour faire face à cette situation, les promoteurs diversifient leurs activités, s'engageant dans des secteurs tels que les entrepôts logistiques, les data centers et les installations photovoltaïques. Une réalité alarmante pour les ménages français qui aspirent à devenir propriétaires, un rêve pour près de 75% d'entre eux, mais qui s'éloigne de plus en plus.
Photo : Émilie Drouinaud