Une analyse qui semble toutefois se baser que sur les grands détenteurs de cryptos.
Le marché des cryptomonnaies connaît un regain de forme depuis fin 2023, avec des prix atteignant à nouveau des sommets. Cependant, la hausse des prix ne semble pas suffire à relancer l’enthousiasme des consommateurs pour la détention de cryptomonnaies. En effet, une analyse récente menée par la Federal Reserve Bank de Philadelphie montre un décalage persistant entre l'augmentation des prix du marché et le nombre de personnes possédant des actifs cryptographiques. Une réalité qui interroge sur la dynamique actuelle du marché.
Une déconnexion entre marché haussier et acquisition d’actifs
Selon l’étude publiée en septembre 2024 par Tom Akana, du Consumer Finance Institute (CFI), l’intérêt pour l’achat et la détention de cryptomonnaies, particulièrement le Bitcoin, ne suit pas la même courbe que les prix. Les résultats sont basés sur plusieurs vagues de sondages réalisés par le CFI entre janvier 2022 et juillet 2024. Ces sondages montrent clairement une baisse continue du pourcentage de personnes détenant des cryptomonnaies, même lors de la récente reprise des prix.
En 2022, la « crypto winter » avait fait chuter les prix de façon drastique, et ce repli s'était accompagné d'une baisse notable du nombre de détenteurs d’actifs numériques. Entre janvier 2022 et octobre 2022, le taux de possession de cryptomonnaies est passé de 24,6 % à 19,1 %, en ligne avec le déclin du marché. Toutefois, la dynamique a changé à partir de 2023. Bien que le marché ait repris des couleurs, avec des hausses impressionnantes du prix du Bitcoin (jusqu’à 60 % entre octobre 2023 et mars 2024), les taux de détention n’ont pas suivi. En avril 2024, par exemple, le taux de possession n’était que de 16,1 %, à peine supérieur à celui d’octobre 2023, et en juillet 2024, ce chiffre avait même chuté à 14,7 %.
Une hausse des prix qui attire, mais ne convainc pas
Ces données soulèvent des questions sur les facteurs qui influencent la décision des consommateurs de conserver ou d’acquérir des cryptomonnaies. Il semblerait que la hausse des prix ne suffise plus à convaincre de nouveaux acheteurs, bien que l’intérêt pour une acquisition future semble en revanche progresser.
En effet, l’étude souligne que l’intention d’achat futur a sensiblement augmenté, notamment chez les non-détenteurs. Lors du sondage d’avril 2024, 21,8 % des répondants se disaient susceptibles d’acheter des cryptomonnaies dans le futur, contre seulement 10,6 % en octobre 2022. Cette augmentation du désir d'acquisition montre bien l’attrait persistant des cryptomonnaies, mais un attrait encore timide qui ne se traduit pas en action immédiate d’achat.
Pourquoi cette déconnexion ?
Plusieurs hypothèses peuvent expliquer cette déconnexion entre la hausse des prix et l’absence de réaction immédiate des consommateurs.
- Un environnement macroéconomique incertain : les investisseurs peuvent hésiter à se lancer dans les cryptomonnaies, même avec une hausse des prix, en raison des incertitudes économiques globales, des réglementations fluctuantes ou des craintes concernant la volatilité des actifs numériques.
- Une mémorisation des crises passées : le souvenir encore frais des effondrements précédents, comme celui de 2022, pourrait freiner les investisseurs potentiels. Bien que les prix aient remonté, le risque perçu reste élevé, et les consommateurs pourraient attendre des signes plus stables avant de réinvestir massivement.
- Des profils d’investisseurs plus prudents : l'étude met également en avant que les profils des détenteurs de cryptomonnaies ont évolué. Alors que la détention d’actifs était plus diffuse en 2021, les répondants semblent désormais être plus expérimentés et prudents, ce qui pourrait expliquer la réticence à entrer ou à revenir sur le marché.
Des études qui nuancent les résultats de la Fed
D’autres analyses offrent un éclairage différent. Un rapport de Crypto.com de janvier 2024 révèle que le nombre d’utilisateurs de cryptomonnaies a bondi de 34 % en un an, atteignant 580 millions malgré la faiblesse des prix. En France, l’ADAN estime que 12 % des Français possédaient des cryptos début 2024, contre 8 % en 2022.
Ces chiffres, bien que divergents, pourraient s’expliquer par des méthodologies distinctes, certaines études incluant de petits porteurs, alors que la Fed se concentre probablement sur des détenteurs plus significatifs.
Vers une reprise du marché de la détention ?
Malgré ces constats, le potentiel de croissance du marché reste bien présent. Si la possession actuelle d’actifs n’augmente pas, l’intention d’achat, notamment parmi les non-détenteurs, montre une tendance à la hausse. Cela pourrait signaler un rebond dans les prochaines années, à condition que les conditions économiques et réglementaires deviennent plus favorables.
Le marché des cryptomonnaies semble donc se diriger vers une période où seuls les investisseurs les plus avertis se lancent dans l’achat d’actifs, tandis que le grand public reste sur la réserve. Si la hausse des prix attire l’attention, elle ne convainc pas encore suffisamment pour entraîner une reprise des taux de possession.
Quelles perspectives pour les experts en gestion de patrimoine ?
Dans ce contexte, les experts en gestion de patrimoine, banquiers privés et family offices doivent adapter leur approche face à des clients de plus en plus prudents, tout en restant attentifs aux évolutions rapides du marché des cryptomonnaies. L'intérêt pour les cryptomonnaies pourrait encore augmenter, mais il semble nécessaire de bien cerner le profil de risque des investisseurs et d’accompagner leurs décisions avec une stratégie sur le long terme.
Les fluctuations du marché ne suffisent plus à motiver les investisseurs à se lancer ; le rôle des conseillers devient donc crucial pour éclairer les décisions dans un secteur qui reste aussi volatile que fascinant.