Dans un contexte où la finance durable s’impose comme un pilier incontournable des stratégies d’investissement, les investisseurs doivent jongler entre performance, liquidité et impact environnemental. Le panel "Liquidité et performance : le bon équilibre entre actifs durables liquides et illiquides", organisé lors du Future of Wealth Forum, a réuni des experts pour explorer les meilleures pratiques d’allocation d’actifs et répondre aux défis d’un marché en mutation.
Modéré par Bertrand Schmeler, Head of Wealth Management chez Mirabaud & Cie (Europe) SA, le panel a accueilli Arnaud Miroudel, Chief Investment Officer chez Cardif Lux Vie, Michael Sfez, Associé Fondateur de Kermony Office, et Jérôme Bottari, Président de Krios Capital.
Performance et durabilité : un arbitrage clé
La quête d’un équilibre entre actifs liquides et illiquides est une préoccupation centrale pour les investisseurs soucieux de durabilité. Alors que les actifs liquides offrent flexibilité et réactivité aux fluctuations du marché, les actifs illiquides, notamment le private equity et l’immobilier, permettent d’ancrer les investissements dans des tendances de long terme, souvent alignées avec des objectifs ESG.
Arnaud Miroudel a rappelé que les contraintes réglementaires en assurance vie, pour les Unités de Comptes en particulier, influencent fortement ces décisions : "Plus l’investissement est conséquent, plus la réglementation permet une exposition aux actifs illiquides, favorisant ainsi une diversification efficace." Pour la gestion du Fonds Général, le choix entre actifs et illiquides procède d’abord de la gestion actif-passif. Sur cette base, le gérant met en œuvre une politique ESG sur les deux types d’actifs cotés et non cotés. « Dans une allocation d’actifs efficace, nous voyons une vrai complémentarité entre actifs durables liquides et illiquides, non une concurrence » indique Arnaud Miroudel.
Les actifs illiquides : une opportunité pour l’investissement responsable
Le développement des actifs illiquides dans le cadre d’une finance durable connaît une accélération. Jérôme Bottari, spécialiste de la dette privée et du financement immobilier, souligne : "Nous finançons de plus en plus des projets de réhabilitation plutôt que des nouvelles constructions, une tendance qui s’impose naturellement pour réduire l’impact environnemental."
Dans l’univers du private equity et des fonds alternatifs, cette dynamique s’accompagne d’une exigence accrue en matière de transparence et d’impact mesurable. Les investisseurs cherchent des solutions qui non seulement génèrent de la performance, mais qui s’inscrivent également dans des engagements concrets de durabilité.
L’augmentation de l’intérêt pour les actifs illiquides reflète également une volonté de contourner la volatilité des marchés financiers. De nombreux investisseurs perçoivent ces classes d’actifs comme un moyen de stabiliser leurs portefeuilles tout en contribuant à des projets à fort impact social et environnemental.
La transparence : un impératif pour une finance durable crédible
L’un des défis majeurs de la finance durable réside dans la fiabilité des données ESG. Si les labels et notations se multiplient, leur cohérence laisse parfois à désirer. Bertrand Schmeler met en avant l’importance d’un reporting rigoureux : "Il ne suffit pas de labelliser un produit, il faut offrir aux investisseurs une information claire et mesurable sur l’impact réel de leurs allocations."
Les agences de notation ESG doivent encore harmoniser leurs méthodologies pour éviter des divergences d’évaluation qui peuvent brouiller la lecture des investisseurs. Une meilleure standardisation et des critères de transparence renforcés sont des leviers cruciaux pour crédibiliser la finance durable.
En parallèle, les acteurs du marché doivent s’assurer que ces données ESG ne servent pas uniquement d’arguments marketing mais permettent réellement de guider les décisions d’investissement de manière éclairée et objective.
Un futur en mutation : vers une finance durable plus accessible
Tous les experts s’accordent sur le fait que la finance durable est en pleine transformation. Michael Sfez met en avant la complexité croissante du cadre réglementaire : "Les réglementations foisonnent et rendent l’offre illisible pour les investisseurs. Nous avons besoin d’une simplification pour favoriser un engagement massif dans la finance durable."
Cette complexité réglementaire s’accompagne d’une évolution des attentes des investisseurs, qui cherchent davantage de transparence et d’alignement avec leurs valeurs. Dans ce contexte, les professionnels doivent redoubler d’efforts pour proposer des solutions d’investissement accessibles et compréhensibles, tout en garantissant un impact réel.
Face à ces évolutions, de nouvelles tendances émergent, notamment dans l’intégration des critères ESG dès la conception des produits financiers. L’innovation dans les instruments d’investissement durable pourrait bien être la clé d’une adoption massive par les investisseurs particuliers et institutionnels.
Une finance durable en quête d’équilibre et d’impact
L’avenir de la finance durable repose sur une capacité accrue à intégrer la performance, la liquidité et la durabilité dans une allocation d’actifs cohérente. La complémentarité entre actifs liquides et illiquides s’impose comme une nécessité pour répondre aux nouveaux défis économiques et environnementaux.
L’industrie doit encore évoluer pour simplifier l’accès à l’investissement durable, améliorer la transparence des données ESG et garantir une gestion des risques optimisée. Ce panel a mis en lumière les défis et opportunités qui façonneront les choix des investisseurs dans les années à venir. Les investisseurs et gestionnaires d’actifs doivent rester agiles et proactifs face aux nouvelles exigences du marché. La finance durable ne doit pas être une simple tendance, mais un moteur de transformation en profondeur des pratiques financières et économiques.
Comme le souligne Bertrand Schmeler : "L’avenir de l’investissement durable dépend de notre capacité à proposer des solutions qui conjuguent performance et impact réel, tout en restant accessibles aux investisseurs de tous horizons."