"Les marchés sont devenus plus compliqués, les approches 60/40 ne fonctionnent plus comme avant" : Jean-Marc Spitalier, Clerville Family Office

Written by
Hubfinance
Published on
September 11, 2024
Copied
https://www.hubfinance.com/blog-post/cote-interview-clerville-jean-marc-graine
https://www.hubfinance.com/blog-post/cote-interview-clerville-jean-marc-graine

Pour ses 30 ans, Clerville IM revient sur son évolution de single à multi family office en 2007. Jean-Marc Spitalier, nous dévoile les principes clés qui guident la stratégie de Clerville aujourd’hui

Clerville IM fête ses 30 ans, avec un passage de single family office à multi family office en 2007, avec quel ADN?

Notre ADN, depuis la création, a toujours été notre indépendance de choix dans l’intérêt de nos familles. Par exemple, nous appliquions l’interdiction de toucher des rétrocessions avant même MiFID II. L’alignement d’intérêts est aussi un principe originel, puisque la famille fondatrice, les autres familles et les partenaires sont tous investis dans les mêmes produits. Notre spécialisation dans la gestion financière n’est pas surprenante compte tenu de notre création initiale au Royaume-Uni.

La perception extérieure d’un MFO très axé marchés, privilégiant les solutions liquides ou semi-liquides est-elle justifiée aujourd'hui, surtout pour une équipe qui a de grandes compétences également en gestion alternative en son sein ?

Les marchés sont devenus plus compliqués, et les approches 60/40 ne fonctionnent plus comme avant. Nous avons connu une poussée d’inflation unique, qui a provoqué des corrélations négatives sur la plupart des classes d’actifs. Nous avions identifié ce risque et avons investi 100 % de notre poche obligataire dans des produits semi-liquides à taux variables. Sur la période 2022-2023, la surperformance a été de l’ordre de 25 % par rapport aux obligations 'Investment Grade'. Cette année encore, nous enregistrons une surperformance de 10 % à mi-année. Voici une illustration de ce que nous cherchons à accomplir : éviter les risques de marché inutiles tout en essayant de gagner chaque année. Quant à l’illiquide, nous y recourons seulement si nécessaire, et plutôt dans des produits de crédit. Les frais dans l’illiquide sont très élevés, notamment dans le Private Equity (entre 3 % et 6 % par an), et les calculs des TRI (Taux de Rendement Internes) ne nous semblent pas corrects, car ils ignorent l’immobilisation relative du capital pendant la période d’appel.

Nous avons étoffé nos capacités internes en gestion alternative avec l’arrivée de l’équipe de Fauchier partners, ce qui nous permet d’augmenter de façon sélective notre accès aux stratégies dites “marché neutre” ou “long-short”, mais aussi de trouver des fonds de protection long volatité très efficaces.

Comment caractériser la singularité de Clerville en matière de recherche et de sélection ?

Pascal et moi cumulons 45 ans d’expertise dans la sélection de fonds complexes dans les salles de marché.Nous sommes aidés par trois analystes seniors et par l’expérience des 5 autres associés aux parcours complémentaires dans des banques internationales. Nous comprenons les risques de marché, les stratégies des gérants et les risques qu’ils prennent. Notre approche de due diligence est permanente et indépendante, nous partons librement dès que nous le souhaitons car nous n’avons pas d’intérêts économiques avec eux.

Pour le volet structuration patrimoniale, vous collaborez donc avec d'autres MFO ?

Les 7 associés sont des praticiens de la structuration patrimoniale et peuvent gérer les projets. Nous avons décidé de ne pas avoir de ressources légales ou fiscales dédiées, car ces matières sont très vivantes et de plus en plus complexes compte tenu de l’internationalisation des familles. Nous faisons donc appel à des cabinets externes, choisis en fonction de chaque projet/juridiction. Pour certaines familles, nous collaborons avec des MFOs qui nous mandatent pour la gestion.

Quels sont les grands challenges aujourd’hui qui focalisent votre attention dans la poursuite de l’excellence chez Clerville ?

Le poids des réglementations, l’obligation d’être régulés dans l’Eurozone et au Royaume-Uni, voire en Suisse pour couvrir l’Europe, augmente nos coûts et mobilise nos ressources. Nous avons cependant réussi à maximiser les procédures de groupe et à automatiser de nombreux contrôles grâce à notre système d’information interne très poussé sur la gestion des risques et le règlementaire. Au final, en ayant fait le choix de la spécialisation, nous nous occupons essentiellement de la gestion des finances de nos familles, en évitant tout risque de dispersion, et l’excellence ne peut être obtenue qu’en restant une équipe de professionnels cooptés, disciplinés, indépendants et alignés.